Et si Paris-Brest-Paris se jouait en dormant ! (2)

Paris-Brest-Paris – Photo : ©Audax Club Parisien

Le sommeil est la forme la plus aboutie du repos !

« La Gazette »

Quelle stratégie pour gérer son sommeil ?

On aura compris en lisant la précédente chronique que réaliser, Paris-Brest-Paris (PBP) n’est pas une mince affaire, que cela ne peut pas s’improviser et que la réussite du raid sera subordonnée à une parfaite maîtrise de différents facteurs déterminants. A partir d’une longue préparation (12 à 18 mois) il faudra savoir gérer son stress, il faudra savoir bien équiper son vélo et faire les bons choix de matériels, il faudra bien gérer son alimentation, car on ne vit pas sur cette épreuve d’amour (du Vélo) d’eau fraîche et de barres de céréales. Il faudra, pour ceux qui en auront, savoir gérer son assistance. Il faudra savoir gérer son effort et parfois maîtriser ses ardeurs. Enfin, il faudra gérer son sommeil, tant au plan physiologique que matériel. C’est l’objet de cette seconde partie de chronique.

Nul besoin de faire la démonstration pour savoir que le sommeil est fondamental pour permettre la régénération physique et mentale. Sur PBP, rares sont ceux qui parviennent à Paris sans dormir. Ce sont en général les plus rapides qui se situent sous la barre des 50h. Pour les autres, les méthodes et les conditions de sommeil sont très variables. Il est vrai que nous ne sommes pas égaux devant le sommeil. Il y a des lève-tôt et des lève-tard, de gros dormeurs et de petits dormeurs.

Que dit la science à ce sujet ?

L’INSERM (Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale) a publié en 2017 un intéressant dossier à ce sujet (*). Il a été établi que le sommeil se divise en cycles d’une durée moyenne de 1h30, eux-mêmes divisés en quatre phases et que la structuration des cycles évolue au cours de la nuit. Le schéma ci-dessous illustre très bien les différents stades du sommeil et leurs évolutions dans le temps.

Pour notre part, nous retiendrons trois types de sommeil. Le plus important pour PBP, c’est le sommeil lent profond. Il est en vert dans le schéma (couleur des maillots de Saint Avé). C’est celui qui permet, à lui seul, de récupérer plus de 50 % des efforts musculaires fournis dans la journée. Il se produit au cours des deux premiers cycles, c’est-à-dire dans les trois premières heures du sommeil. Plus la dette de sommeil est importante, plus le sommeil lent et profond est intense.

À partir du troisième cycle, ce sommeil lent devient plus léger (en orange) et permet surtout la récupération nerveuse et psychique. Le sommeil paradoxal (en rouge) est celui des rêves. Il est plus soutenu en fin de nuit, mais pas le temps de rêver sur Paris-Brest-Paris !. L’essentiel est de pouvoir récupérer la grande quantité  d’efforts musculaires et la privation de sommeil. Cela se fera pour l’essentiel au cours des deux premiers cycles de sommeil. Ainsi 3h à 4h suffiraient à se régénérer pour repartir vers Paris après une nuit blanche et une journée de pédalage.

De nombreux témoignages montrent par ailleurs, qu’après une pause sommeil durant l’épreuve, le réveil se révèle plus ou moins facile. Certains se sentent en forme et reposés. D’autres ont le sentiment tout au long de la journée de dormir à moitié et de ne pas avoir récupéré. En la matière, c’est l’horloge interne qui pourrait être en jeu, ainsi que le respect des rythmes circadiens. C’est-à-dire l’alternance au cours d’une journée entre l’éveil et le sommeil. Ainsi, il est préférable de se réveiller entre deux cycles de sommeil, plutôt qu’un beau milieu d’un cycle. Dans les deux cas, les sensations seront bien différentes. De même, il est mieux de s’accorder un somme en fin de nuit de manière à repartir au lever du soleil, lorsque la nature et les petits oiseaux se réveillent aussi. Le respect, dans la mesure du possible, des rythmes biologiques et circadiens sembleraient être un atout en la matière. Il en va de même pour l’alimentation, respecter le petit déjeuner, le déjeuner et le dîner est très important. L’organisme est suffisamment perturbé pour ne pas en rajouter.

Chacun étant différent devant le sommeil, qu’elles peuvent être les choix stratégiques ?

Des choix stratégiques cruciaux.

  1. Ne pas dormir : c’est prendre des risques. Il faut pour cela bien se connaître et connaître ses limites car on peut très bien s’endormir en pédalant.
  2. Dormir 2h à 4h par nuit : on peut faire une nuit blanche et dormir 4h à 5h la seconde nuit, c’est la stratégie de Bertrand, ou alors dormir 2h à 3h chaque nuit. 
  3. Faire des micros-sommeils : c’est la formule adoptée par les navigateurs solitaires. C’est le sommeil dit «polyphasique». Le navigateur dort environ 1 heure et cela 4 à 5 fois par 24 heures. Ce peut-être également faire des sieste de 15 à 20 minutes toutes les 5h à 6h.
  4. Faire une vraie nuit : c’est celui qui perturbe le moins le corps. Il ne s’agit pas alors de chercher à battre son record mais de rentrer les pieds en éventail dans les délais de 90 heures.

Dans tous les cas, il est préférable de se fixer un plan de sommeil et de prévoir ou de choisir les conditions matérielles de celui-ci. Tout improviser en se fiant à ses seules sensations du moment, c’est prendre le risque de très mal dormir et dans de très mauvaises conditions, en bordure de route, en plein soleil et en plein après-midi par exemple… Tout faux. Les photos des précédents, Paris-Brest-Paris sont édifiantes à ce sujet.

En fait les conditions  de cette fantastique chevauchée sont exceptionnelles et sortent de l’ordinaire. Elles obligent à flirter avec ses propres limites, mais il convient d’être suffisamment raisonnable et particulièrement vigilant pour ne pas les dépasser.

JY.LP

Sources : (*) INSERM – Faire la lumière sur notre activité nocturne

INSEP – Sommeil et récupération – Les entretiens de l’INSEP

WTS : Sommeil et récupération chez le sportif

RUNNING : Sommeil et récupération – Optimisez vos performances

La gestion du sommeil sur Paris-Brest-Paris

Ne pas dépasser les limites

Des images édifiantes... à éviter - Copie d'écran Google

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